J'en entends parler depuis que je suis petite de ce sommet, le Gélas.
Avec ses 3143 mètres, il est le plus haut sommet du Parc National du Mercantour et des Alpes-Maritimes.
Parce que de nombreux glaciers étaient présents sur un grand nombre de ses flancs jusqu'au début du XXème siècle, il a été appelé ainsi, "gela" pour "geler" en niçois.
Bien que ces glaciers aient disparu depuis, ce sommet reste convoité par les alpinistes et les amoureux de la montagne.
Je ne pensais pas le faire là, si soudainement.
D'ailleurs, au moment où je vous écris, je ne l'ai pas encore fait. Je l'imagine et je m'imagine dans ce fameux couloir (la voie dite "normale") que l'on m'a décrit comme la dernière ligne verticale avant d'accéder au sommet.
Ce couloir dans lequel les blocs se déversent comme dans un entonnoir.
Un casque est recommandé dans cette zone pour les éventuelles chutes de pierres.
La météo sera décisive, il est impératif qu'il fasse beau et que la pluie ne s'invite pas ce jour-là. J'ai choisi un jour de semaine pour me mettre à l'abri de l'affluence des randonneurs du week-end.
Je partirai avec mon père. Il avait tenté cette ascension, il y a longtemps (plus de 35 ans). Mais le mauvais temps ne lui avait pas permis de mener à terme cette expédition unique. Bloqué au pied du couloir, il avait du rebrousser chemin. Il n'a jamais retenté l'ascension depuis.
J'ai hâte d'y être. Moi qui ne voyais que par le plaisir de la traversée, j'ai pris goût aux sommets... aux sensations que cela fait naitre.
À très vite pour le récit de l'ascension du Gélas.
Le Jour J :
5h30 du matin, les yeux encore gonflés par une nuit de sommeil trop courte, je prends la route direction la Madone des Fenestres.
Je ne réalise pas vraiment que je m'apprête à faire l'ascension d'un rêve d'enfant que je ne pensais même pas à ma portée à l'âge adulte.
Dans la voiture, l'atmosphère est sereine. Pourtant, en moi, l'excitation plane...
J'ai hâte...
Les chaussures parfaitement lacées, le sac réglé et resserré sur les hanches, nous entamons une longue montée.
Dans la lumière du petit matin, le sommet se dessine.
Durant la première heure, les pas sont lourds et les jambes sont froides. En bon diesel que je suis, il me faudra un peu de temps pour obtenir une foulée régulière et légère.
Rapidement, le sentier se dessine dans des blocs rocheux qui sollicitent les jambes. Les cairns indiquent le bon chemin.
Mais, parfois, elles sont trop espacées et nous nous trompons de direction.
Une fois rendue au pied du couloir, je me remémore ce que mon père m'a conté, à quelques reprises, quand j'étais plus jeune : "J'avais du m'arrêter en bas du couloir...le temps ne nous avait pas permis de monter..."
Et justement, nous y sommes au pied du couloir... Solennellement, nous enfilons nos casques. Il est fortement recommandé de l'avoir sur cette portion et nous ne prenons pas le risque de faire l'impasse sur cet équipement.
Le couloir est étroit, impressionnant et monte "franchement". Mais, il n'y a pas de vide, nous sommes entourés par deux parois rocheuses.
Il nous faut trouver le bon passage. La difficulté est telle qu'un jeune couple d'allemand préfère s'arrêter là.
Nous décidons, alors, de ne pas nous engager directement dans le couloir, qui nous parait bien trop difficile.
Nous le longeons sur le côté droit, la présence de prises pour les mains et les pieds, nous permettent de nous hisser sur la parois et, ainsi, rejoindre le couloir un peu plus haut.
Tels des bouquetins, nous nous frayons un chemin.
Mon père me suit derrière et je l'encourage car les derniers mètres sont difficiles.
Encore quelques efforts... après plus de 4h de marche, le sommet est, enfin, sous nos pieds.
Tout naturellement, nous nous prenons dans les bras et nous nous félicitons mutuellement. Quel plaisir plus intense y a-t-il que de partager, avec une personne qui compte vraiment, ce genre de moment ?
Les joues rougies par le froid et par l'effort, nous enfilons nos vestes et nous prenons un moment pour contempler ce panorama d'exception qu'aucun appareil photo ne pourra retranscrire aussi bien que nos yeux. L'émotion est palpable.
Dans la descente, la prudence est en première ligne. Mon père est devant cette fois, pour me sécuriser au cas où.
Je le regarde descendre quand tout à coup, j'entends une sorte de claquement. Je comprends que des pierres se décrochent au-dessus de nos têtes. Blottie contre la parois, je lui hurle de se protéger et de se baisser.
Mais, il est en équilibre et ne peut pas bouger. Impuissante, je regarde les pierres voler dans le couloir et passer au-dessus de sa tête...
Nous avons eu de la chance. Il y a un facteur risque dans l'ascension de ce sommet qui n'est pas négligeable.
Les chutes de pierres sont souvent dues à la présence de nombreux bouquetins dans ce secteur, me dira plus tard le gardien du refuge de la Madone des Fenestres où nous faisons notre halte bière.
"Il ne faut pas être là au mauvais moment..."
Cela fait évidemment parti des dangers de la haute montagne et c'est aussi ce qui fait la réputation de ce sommet délicat...
Je partage avec vous quelques photos de ce moment qui restera gravé en moi comme une expérience unique.
Le Gélas, c'est lui :
Le lac Blanc en chemin :
Le fameux couloir :
La montée dans le couloir :
...
Merci Papa pour tout ce que tu apportes dans ma vie.
Vue sur le lac Long :
On reconnait la cime de la Malédie en face :
Mon père qui fait sa gymnastique dans le couloir 😉:
Si vous regardez bien, on aperçoit la croix du Gélas en haut à gauche :
Croisé en redescendant, ce bouquetin mâle faisait une halte dans ce pierrier :
Le lac Blanc vu d'en haut :
J'adore quand les nuages font danser le relief :
Il nous a surpris lorsque nous faisions une pause après la descente du couloir :
La récompense de fin de journée...😉
Clique pour agrandir
Dénivelé positif : 1267m.
Distance A/R : 10km 400
Céline (jeudi, 20 septembre 2018 22:14)
Gaelle : merci beaucoup, quand je l'ai écrit je venais de rentrer. J'étais moi-même "retournée".
Pascaline : Merci Pascaline, je ne doute pas que tu iras voir là-haut dès que tu le pourras ;)
Anne-B : Merci Anne-B, je suis très contente que mon père y soit parvenu, et encore davantage d'avoir été à ses côtés.
Michèle : Merci beaucoup Michèle ! Tu en sais quelque chose toi ;)
Luce : Merci de partager notre "satisfaction", voir notre soulagement ;)
Olivier : Mais certainement ! et tu m'enverras les photos :))
WalkingOlive (jeudi, 20 septembre 2018 00:35)
Une super escapade j’espere Avoir l’occasion de la faire bientôt !
luce buadès (lundi, 17 septembre 2018 06:27)
je vous félicite tous les deux, de la beauté plein les yeux, superbe
je suis heureuse pour vous de pouvoir le faire
Michele (dimanche, 16 septembre 2018 19:30)
Bravo à vous .... émotion intense à l arrivée au sommet
Anne bé (dimanche, 16 septembre 2018 16:51)
C'est magnifique! Et j'imagine ta joie et celle de ton papa d'avoir "réussi" cette ascension. Bravo!
Pascaline (dimanche, 16 septembre 2018 12:14)
Je suis très heureuse pour toi que tu aies pu partager cette ascension mythique avec ton père! Merci pour ton superbe récit qui donne une fois de plus envie de gravir nos belles montagnes. Quand mes genoux iront mieux, j'irai aussi taquiner le gelas�. Bisous!
Gaelle (dimanche, 16 septembre 2018 09:18)
Quelle émotion pour nous aussi de lire cette nouvelle aventure ! Bravo ! Vraiment vous êtes épatants tous les deux. C est beau. J en suis toute retournée. �❤�